Au tour du mortier africain:Une solidarité et une entraide agissante chez les Malinkés
Les noirs de par leur organisation sociale ont mis un accent particulier sur des valeurs telles la solidarité et l’entraide. Ce phénomène se découvre dans tous les actes de la vie du malinké. Une société se définissant sous langle du collectivisme a développé des mécanismes dans la gestion des affaires courantes pour alléger à l’individu les tâches qui l’incombe par la participation communautaire. En effet, chez les malinké, le concept de chacun pour soi était banni au profit de tous tous pour chacun et chacun pour tous. L’individualisme n’avait donc pas droit de cité. Et la personne qui s’évertuait à devenir réfractaire paiera à ses dépends les frais de son inconduite. Il devient alors un devoir moral et social de porter assistance aux autres pour s’assurer un jour le bon retour de l’ascenseur.
Ne dit on pas qu’un seul doit ne saurait prendre le gravier. Il faut en effet la conjugaison des efforts pour réaliser un exploit.
C’est ainsi que nous avons au niveau de la gente feminine, une organisation fondée autour du mortier de la ménagère appelée « xulundala » ou autour du mortier. Avant d’entrer dans les détails de ce sujet, il convient de comprendre le sens d’un mortier , sa fabrication, son utilité pour la femme ainsi que les éléments ésotériques rattachés à cet instrument.
DÉFINITION : récipient creux taillé en bois d’ébène par les forgerons, le mortier est fabriqué à l’usage ménager confié à la charge des femmes. Il permet à ces dernières de transformer les grains de céréales en granulés (nyénenwo)ou en poudre (mungo) selon leur convenance. Il y’a donc deux sortes de mortiers. Le premier avec un fond plus creux appelé en malinké « Soronwo » est utilisé pour extraire le son du grain tandisque le second type s’appelle « Baara » et permet d’écraser les grains pour les moudre en farine.
Le mortier est aujourd’hui l’ancêtre du moulin moderne. Chaque famille traditionnelle malinké en détient un à deux mortier disposés à un endroit bien déterminé de la concession. Généralement installé au flanc de la case-cuisine, loin des hommes, le xulundala ou abord de mortier devient un endroit de retrouvailles des femmes de la famille pour ensemble transformer le céréale de l’état brut à l’état de consommation. Donc la vocation première de xulundala est de se soutenir, d’être solidaire les uns des autres pour réaliser le bonheur commun.
L’installation de xulundala concerne exclusivement les femmes. Les hommes ne s’en approchent qu’avec prudence. Ils préfèrent délégués les enfants s’ils ont besoin de leur mère en disant » Taxa i n’a kili xulundala » (va appeler ta mère au bord du mortier), plutôt qu’eux même ne s’en approche. Les raisons de cette méfiance des hommes à ne pas cotoyer les femmes quand elles sont à leur étable résulte d’une croyance que l’homme qui s’aventurerait à toujours marcher sur les traces du mortier verra ses blindages mystiques anéantis et être ainsi vulnérables.
DOUNDOU KEITA Chercheur en culture et civilisation du peuple malinké de Kéniéba.